Les MJC, des micros républiques face à de macros enjeux
Les MJC, des micros républiques face à de macros enjeux

Les MJC, des micros républiques face à de macros enjeux

Tribune

Face à un inquiétant désengagement des jeunes envers la politique, Thierry Bros, président des Maisons des jeunes et de la culture, appelle les pouvoirs publics à revaloriser le statut des bénévoles et des salariés.

Les Maisons des jeunes et de la culture sont les filles de la République des jeunes créée en 1944. Aujourd’hui, elles constituent un réseau de 1 000 associations locales dont les actions bénéficient à cinq millions de personnes, la moitié ayant moins de 25 ans.

Il y a un an, dans le cadre d’une enquête sur les politiques publiques d’apprentissage de la citoyenneté chez les jeunes, nous avions interviewé trente animatrices et animateurs du réseau. Si tous font leur la maxime selon laquelle on ne naît pas citoyen, on le devient, que c’est le fruit d’un parcours et que chaque MJC est un outil éducatif vers l’engagement, ils pointent les obstacles auxquels ils et elles font face dans la mise en œuvre de leurs actions éducatives.

Il est urgent d’aider les jeunes à retrouver confiance dans les institutions, les représentants de la République et le sens de la citoyenneté. Si toutes les enquêtes confirment que les jeunes restent très engagés, la jeunesse d’aujourd’hui s’interroge sur l’utilité du vote et la capacité des institutions démocratiques à transformer la société. Ils ont l’impression d’appartenir à une génération sacrifiée, et perçoivent plus l’Etat comme un producteur de normes que comme un facilitateur d’émancipation citoyenne – en contradiction avec le projet républicain que nous cherchons à transmettre.

Il est urgent de mieux valoriser les métiers de l’animation et de l’éducation populaire et d’aider les MJC à travailler au quotidien. L’action quotidienne des associations MJC repose sur des bénévoles engagés et des professionnels formés. Or, à ce jour 10 % des postes salariés ne sont pas pourvus. En effet, ces métiers souffrent d’une faible reconnaissance, de conditions de travail et de rémunérations insuffisantes. Il est temps de reconnaître que travailler avec les jeunes autour de projets citoyens est une chose utile pour la société et difficile à faire, notre métier étant celui de l’humain.

Il est urgent de faciliter la coopération entre les associations d’éducation populaire et l’école pour coconstruire ensemble les parcours citoyens. La plupart des actions que les structures locales, départementales ou régionales des MJC conduisent en coopération avec les établissements scolaires sont le fruit de l’énergie et de la bonne volonté des acteurs – non d’un système qui les facilite. En effet, beaucoup d’associations rencontrent des difficultés pour travailler avec les établissements scolaires alors que l’éducation populaire a rejoint récemment le ministère de l’éducation nationale.

Il est urgent de construire des relations partenariales et cohérentes sur le long terme entre les associations d’éducation populaire et les pouvoirs publics. Rares sont les jeunes qui passent la porte de la MJC avec un projet abouti : il s’agit du fruit d’un accompagnement dans la durée. Or, un écart se creuse entre le «temps de la MJC», – le temps de l’action collective et de l’expérimentation – et l’horizon de plus en plus court de ses partenaires. Les attentes portent souvent sur des effets rapides et faciles à évaluer ce qui est incompatible avec un travail éducatif de qualité. Cette difficulté à nouer d’authentiques relations de partenariat avec les pouvoirs publics et se projeter sur le long terme limite la portée de notre action, décourage les bénévoles et fragilise les conditions de travail des professionnels.

Les MJC portent un projet d’éducation populaire exigeant et sont prêtes à contribuer à relever les défis de notre société mais pour cela il convient de les aider à franchir ces obstacles.

par Thierry Bos, président de la Confédération des MJC de France publié le 8 mars 2022 à 17h35